Les jeux de coupe - 2/2 (R. Berthe - Bridgeur n°713 - décembre 1998)

 

Suite de : Les jeux de coupe 1/2 (M. Bessis - Bridgeur n°710 - septembre 1998)

 

 

Dans cette chronique de Bridge Pour Tous, nous avons souligné l'avantage indéniable du jeu à la couleur par rapport à celui à Sans-Atout, notamment par la possibilité de réaliser des levées de coupe, et du même coup de parvenir à réaliser plus de levées qu'il n'y a de cartes du côté le plus long. Malheureusement, ces avantages liés à l'atout ne sont pas votre bien exclusif.

Comme vous pouvez aisément l'imaginer, les joueurs de flanc profitent de toutes les opportunités qui leur sont offertes : couper vos cartes maîtresses, surcouper ou bien encore promouvoir certains de leurs atouts.

C'est dire que vous devrez systématiquement songer à lutter contre ces risques. Bien sûr, l'idéal consisterait à extraire tous les atouts des défenseurs ou à ne leur laisser que ceux qui sont maîtres, mais cela ne sera pas toujours possible (notamment quand certains de vos atouts sont nécessaires à la mise en œuvre de votre propre stratégie, ou bien quand ce sont les adversaires qui ont la maîtrise des opérations).

Les techniques dont vous disposez pour éviter les risques ou tout au moins les atténuer, sont nombreuses. Citons-en quelques-unes en vrac :

- ouverture de coupe au moment opportun et parfois par un coup à blanc,

- maniement correct des atouts (par exemple en jouant de la bonne main ou en donnant un coup à blanc),

- transfert de coupe,

- sauvegarde de vos honneurs dans les couleurs annexes,

- raccourcissement,

- choix judicieux de la main de base en cas d'atouts 4-4.

 

Voyons tout cela au travers d'exemples, forcément un peu plus délicats que ceux étudiés précédemment puisqu'ils les complètent. Pour que votre étude soit la plus profitable possible, nous vous conseillons de commencer par cacher les jeux d'Est-Ouest.

 

I - EVITER LES SURCOUPES

 

Il n'y a que deux moyens de vous prémunir contre un tel risque : soit couper maître si vous en avez les moyens, soit ouvrir une coupe dans une autre couleur. Vous pouvez aussi vous ingénier à ne laisser traîner chez l'adversaire qu'un atout maître. En pareil cas, une surcoupe ne vous sera généralement pas préjudiciable.

 

A) Couper maître

 

               ♠ A X                            Contrat : 4 Piques.

               R 2

               V 7 6 2                        Entame  : 10 de Cœur.

               A 7 6 5 3

 

♠ 3                         ♠ V 5 4 2

X 9 7 6 4                  D V

A D                       R X 9 4 3

X 9 8 2                   R V

               ♠ R D 9 8 7 6

               A 8 5 3

               8 5

               4

Ayant dénombré en dehors des atouts 2 perdantes à Carreau et 2 à Cœur, vous allez vous ingénier à effacer ces dernières en les coupant au mort. D'ordinaire, et cela paraît somme toute assez logique, quand on a 2 coupes à effectuer, on coupe la première fois avec le plus petit atout, se réservant de couper maître au tour suivant.

Procéder de cette façon dans le cas présent serait voué à l'échec. Est surcouperait du Valet, cela n'est pas grave en soi, mais le retour atout qui s'ensuivrait serait dramatique car vous resteriez avec une perdante Cœur sur les bras. Assurez votre contrat en coupant de l'As la première fois!

 

B) TRANSFERT DE COUPE

 

Quand les enchères vous enseignent qu'à l'évidence vous risquez fort de vous faire surcouper, essayez d'ouvrir une coupe dans une autre couleur par un jeu de perdante sur perdante. Dans ce premier exemple, des plus classiques, vous jouez le contrat de 4♠, après qu'Ouest a ouvert de 1 :

♠ R X 4 2

D 2

A 9 3

A R 7 6

Face à :

♠ A D 7 5 3

9 5 4

R 6 4

X 4

Ouest entame de l'As de Cœur, suivi du Roi puis du Valet. Si vous coupez le troisième Cœur, même avec le 10, vous risquez d'être surcoupé. Et si vous le faites avec le Roi, vous ne viendrez plus à bout du partage 3-1 des atouts, pourtant le plus fréquent.

La solution est simple : ne faites ni l'un ni l'autre! Défaussez tout bonnement le 3 de Carreau. Vous couperez en toute sérénité votre troisième Carreau après avoir purgé les atouts adverses.

 

Exercice n°1

               ♠ A 3 2                          S    O    N    E

               R 3 2                          1♠   2   X    -

               D X 4 3 2                      2♠   -    3♠   -

               V 2                            4♠

♠ V                         ♠ X 9 8             Entame  : Roi de Trèfle

A X 9                     V 8 7 6

9 8 7                     R V 6 5

R D X 9 8 7               6 5

               ♠ R D 7 6 5 4

               D 5 4

               A

               A 4 3

Vous vous comptez quatre perdantes : deux à Cœur et deux à Trèfle. Vous prenez de l'As et rejouez Trèfle pour ouvrir la coupe. Mais en réalité, il serait très dangereux de vouloir couper un Trèfle. Vous risqueriez d'être surcoupé si vous coupiez petit; et si vous coupez de l'As, vous affranchirez un atout adverse quand les Piques sont 3-1. Le mieux, et en tout cas le plus sûr, est de défausser un Cœur sur le troisième Trèfle afin de préparer une coupe à Cœur que vous effectuerez après avoir délogé l'As.

 

Exercice n°2

               ♠ R 4 2                          Contrat : 6 Piques

                R 6

               A V                            Entame  : 10 de Carreau

               D X 9 7 4 3

♠ 6 3                       ♠ 8 7 5

D X 8 4                   7 3

X 9 8                     R D 6 4 3 2

R V 8 5                    6 2

               ♠ A D V X 9

               A V 9 5 2

               7 5

               A

Comme souvent dans une telle conjoncture, vous devez entreprendre en toute priorité l'affranchissement des Cœurs, votre couleur secondaire (les Trèfles ne pouvant être exploités par manque de rentrées) : As de Carreau, Roi, As et petit Cœur. Cette coupe étant menacée, vous coupez du Roi et vous vous en félicitez quand vous voyez Est défausser un petit Carreau. Vous rentrez en main par l'As de Trèfle pour jouer à nouveau Cœur, Ouest fournissant la Dame. Cette fois, vous n'avez plus d'atout maître au mort. Alors défaussez le Valet de Carreau, afin de transférer la coupe dans cette couleur. Et comme vous avez pris soin de ne pas toucher aux atouts, il vous en restera au moins un en Nord pour couper votre Carreau.

 

C) LES TOURS DE DEBARRAS

 

Dans les exemples précédents, l'adversaire a abordé d'entrée de jeu l'attaque de la couleur à perdantes et il avait de ce fait la maîtrise de la situation. Le plus souvent c'est l'inverse, c'est vous qui contrôlez les événements.

Votre seule préoccupation consistera à déloger le maximum d'atouts adverses et, si possible, à ne laisser traîner que leurs atouts maîtres (se faire surcouper par un atout légitime n'est pas gênant !).

Si vos atouts sont commandés par au moins As-Roi, vous pourrez en donner précisément deux tours à votre guise. Mais si vous n'avez que l'As, il sera indispensable de donner un coup à blanc avant de le jouer. Et ce n'est pas tout, ce retrait partiel des atouts devra être différé si votre coupe n'est pas ouverte.

 

1) La coupe est ouverte

♠ R 6                  Contrat : 4 Cœurs

9 8 4 3              Entame  : Dame de Pique

V 8 3 2

A V X

 

Face à :

 

♠ A 7 5 3

  A R 7 6

7 4

R D 7

 

Vous avez décidé de choisir votre main comme main de base, car il est plus facile de couper deux Piques en Nord que deux Carreaux chez vous. Il suffit de prendre l'entame avec le Roi de Pique, de donner deux tours de débarras, puis de couper les deux Piques perdants. Une coupe ou une surcoupe adverse serait sans conséquence puisqu'effectuée avec un atout maître. Il en irait tout autrement si vous vous faisiez surcouper par le détenteur des deux atouts.

 

♠ R 6                  Contrat : 4 Cœurs

9 8 4 3              Entame  : Dame de Pique

A X 8 2

A V X

 

Face à :

 

♠ A 7 5 3

A X 7 6

7 4

R D 7

 

Même contrat et même entame que dans la donne précédente et ici encore il faut couper deux Piques au mort. Comme deux coupes en Nord seront nécessaires, l'idéal sera également de donner précisément deux tours de débarras. Pour ce taire, il convient de commencer par un coup à blanc, puis de tirer l'As d'atout avant d'effectuer les coupes.

A défaut de cette précaution, le risque encouru serait double :

- Si vous jouez As et petit Cœur, l'adversaire en main serait en mesure de vous priver d'une des deux coupes en tirant un troisième tour d'atout,

- Si vous ne touchez pas aux atouts (ou que vous n'en donnez qu'un seul tour), vous pourriez être surcoupé par le possesseur du doubleton à Cœur et vous vous retrouveriez avec trois perdantes à l'atout au lieu de deux.

 

Exercice n°1

             ♠ A 6 5                            Contrat : 4 Piques

             R 9 8                            Entame  : Dame de Trèfle d'Est qui rejoue le 6

             A 4 3 2

             9 8 7

♠ D X                       ♠ R V 9

V 3                       X 7 6 5

D X 8 6                   V 9 5

D V X 4 2                 A 6 3

             ♠ 8 7 4 3 2

             A D 4 2

             R 7

             R 5

En espérant le partage du reste indispensable 3-2 des atouts, vous avez compté trois perdantes, plus une éventuelle à Cœur en cas de partage 4-2 de la couleur.

Pour donner précisément deux tours de débarras à l'atout, commencez par un coup à blanc, puis tirez l'As. De la sorte, quand vous jouerez les Cœurs, il ne restera dehors qu'un atout maître. Même si l'adversaire coupe l'un de vos honneurs, cela sera sans importance car il restera au mort un petit atout qui aura raison de votre perdante.

 

Exercice n°2

             ♠ R 7 5                            Contrat : 4 Piques

             R 8 5 3                          Entame  : Valet de Carreau pour la Dame du mort et le Roi d'Est

             D 6 4 2

             7 5

♠ 9                           D V X 8

D X 4 2                     V 9 6

V X 9                       R 8 5 3

D X 8 6 2                   V 3

             ♠ A 6 4 3 2

             A 7

             A 7

             A R 9 4

En dehors des atouts, vous avez une perdante à Carreau et deux à Trèfle. Si vous parvenez à couper les deux Trèfles avec les petits atouts du mort, vous pourrez supporter le partage 4-1 des atouts. Mais attention, ne tirez pas le Roi de Pique avant d'effectuer la première coupe à Trèfle, sinon le possesseur des quatre atouts pourrait surcouper et, en revenant atout, vous priver de la seconde coupe. Ce n'est que si la première coupe est couronnée de succès que vous tirerez le Roi d'atout avant d'effectuer la seconde. De plus, vous devez duquer la première levée de Carreau, pour éviter de chuter si Est a deux atouts et deux Trèfles.

 

2) La coupe est à ouvrir

Si vous ne pouvez pas le faire par vos propres moyens (en utilisant une gagnante de l'autre main), vous serez contraint de lâcher la main pour épuiser la couleur que vous voulez couper. Pour laisser le moins possible d'initiatives aux adversaires, vous aurez souvent intérêt à donner le plus rapidement possible un coup à blanc.

 

             ♠ 6 4 3                            Contrat : 4 Piques

             8 7 2                            Entame  : As de Trèfle suivi du Roi

             9 6 5 4

             X 6 3

♠ V X 9                     ♠ D 8

V 9 6 4                    D X

V X 2                     8 7 3

A R 4                     D V 9 8 7 2

             ♠ A R 7 5 2

             A R 5 3

             A R D

             5

Comme vous devez perdre un Trèfle et au moins un atout, il faut vous soucier du quatrième Cœur si le partage est 4-2.

Mais la coupe n'est pas ouverte et vous connaissez les risques que vous encourez (nous les avons évoqués dans une donne précédente) : soit l'adversaire jouera un troisième tour d'atout, vous privant du même coup de la coupe du quatrième Cœur, ou bien il pourra vous surcouper par un atout illégitime. Vous éviterez ces écueils en donnant un coup à blanc immédiat à Cœur. Quand vous reprendrez la main, vous donnerez deux tours d'atout avant de revenir aux Cœurs. L'adversaire ne réalisera que son atout maître.

             ♠ A 5 2                            Contrat : 6 Piques

             A 4 3                            Entame  : atout

             X 9 6 4

             6 5 3

♠ 7 6                       ♠ 8 4 3

D 9 8 6                   V X

R V 8                     D 7 5 3 2

V 9 8 7                   X 4 2

             ♠ R D V X 9

             R 7 5 2

             A

             A R D

Dans la donne précédente, vous avez œuvré pour préserver à coup sûr un petit atout en ne laissant traîner chez l'adversaire qu'un seul atout maître. Le coup à blanc avait parfaitement répondu à ces objectifs. Ici, la situation est fondamentalement différente, puisque vous prévoyez de couper maître en laissant traîner un atout qui ne l'est pas. Dans ces conditions, donner un coup à blanc à Cœur serait non seulement inutile, mais dangereux. Vous risqueriez de vous faire couper ensuite l'As ou le Roi par le détenteur du petit atout s'il est doubleton Cœur. Jouez plus prosaïquement As Roi et petit Cœur. Vous couperez le cas échéant le dernier avec l'As, avant d'extraire le ou les atouts restants et de tabler.

 

D) LA MANŒUVRE DE GUILLEMARD (Vous êtes contraint de laisser traîner un atout que vous pourriez capturer)

 

Quand vous détenez une couleur secondaire répartie 4-3 et comportant des perdantes, il faudra vous préoccuper de votre petite carte qui serait éventuellement perdante, notamment en cas de répartition 4-2. Pour être en mesure de la couper du côté court, il faudra jouer la couleur en espérant que le flanc qui détient le dernier atout ne puisse s'y opposer. Vous l'avez compris : ce ne sera possible que s'il possède, lui aussi, les quatre cartes dans la couleur secondaire.

             ♠ R 8 5                            Contrat : 4 Piques

             R D 4                            Entame  : Dame de Trèfle puis Trèfle

             8 7 5 2

             R 7 5

♠ X 7                       ♠ V 3 2

7 6                       V X 9 8

R V X 3                    D 4

D V X 4 2                 A 9 8 6

             ♠ A D 9 6 4

             A 5 3 2

             A 9 6

             3

En plus du Trèfle déjà concédé, vous allez perdre deux Carreaux. Cela implique de ne concéder aucune levée dans les majeures.

Pour les Piques, le partage 3-2 est souhaitable mais pas nécessaire. En ce qui concerne les Cœurs, point n'est besoin de trouver forcément la répartition 3-3, car vous pourrez peut-être, sous certaines conditions, couper le dernier au mort. Après As et Roi de Pique, vous testez les Cœurs. S'ils sont 3-3 tout va bien : vous enlevez le dernier atout avant d'encaisser le treizième. Si vous vous faites couper l'un de vos honneurs, vous chuterez, mais vous auriez chuté de toute façon. Mais quand les Cœurs seront répartis 4-2, et que le dernier atout se trouve du côté des quatre Cœurs, vous aurez tout loisir de couper votre dernier Cœur.

Exercice

             ♠ 7 4 2                            Contrat : 6 Piques

             8 6 3                            Entame  : Dame de Trèfle

             7 6 5 2

             X 8 3

♠ V 5 3                     ♠ X 9

V 9 7 4                   D X

V 4 3                     D X 9 8

D V 2                     9 7 6 5 4

             ♠ A R D 8 6

             A R 5 2

             A R

             A R

La situation est tout à fait comparable aux précédentes. Ici aussi, il faut espérer que si les Cœurs sont partagés 4-2, les trois atouts soient situés dans la même main que la longue à Cœur.

Nous l'avons vu à plusieurs reprises, il convient d'ouvrir au plus vite la coupe à Cœur par un coup à blanc. Vous encaisserez ensuite As et Roi de Pique avant de revenir aux Cœurs pour couper le dernier, au nez et à la barbe d'Ouest.

 

Exercice

             ♠ 7 4 2                            Contrat : 4 Piques

             8 6 3                            Entame  : 3 tours de Trèfle

             7 6 5 2

             X 8 3

♠ V 5 3                     ♠ X 9

V 9 7 4                   X 2

V 4 3                      D X 9 8

R D 2                     A V 9 7 5

             ♠ A R D 8 6

             A R D 5

             A R

             6 4

Vous coupez et tirez As et Roi de Pique. Tout le monde fournit. Votre contrat est sur table. Et pourtant, il faut utiliser la même technique que dans les donnes précédentes pour tenter de réaliser une levée supplémentaire ce qui, notamment en tournoi par paires, présente un intérêt considérable. Et, en cas d'échec, elle n'occasionne jamais un surcroît de plis de chute. Dans la donne ci-dessus, vous réaliserez, telles que sont les cartes, une de mieux.

Imaginez maintenant que ce soit Est qui détienne les trois atouts. Il vous coupera l'un de vos honneurs maîtres. Mais peu importe puisque vous serez tout de même en mesure de couper au mort votre petit Cœur perdant.

 

II) EVITER DE SE FAIRE COUPER UN HONNEUR

 

Il y a deux moyens d'y échapper:

- ouvrir la coupe par un coup à blanc en se réservant le droit d'encaisser ultérieurement l'honneur que l'on aura préservé,

- jouer le plus de fois possible petit vers les honneurs groupés, de manière que si l'adversaire s'interpose en coupant, ce soit une perdante. Cette technique a été baptisée 'lob'.

 

A) LE COUP A BLANC

 

             ♠ D 8 6 2                          S    O    N    E

             A 3 2                                      1   2

             A R 9 5                          2   -    4

             6 5

♠ V 9 7 5                   ♠ A R X             Entame  : 9 de Trèfle

8 6 5 4                   7

V 8 4 3                   D X 6

9                         D V X 8 7 3

             ♠ 4 3

             R D V X 9

             7 2

             A R 4 2

Ayant dénombré quatre perdantes noires, vous constatez sans peine qu'il vous suffit de couper au moins un Trèfle au mort pour empocher la manche. Seulement la coupe n'est pas ouverte et l'intervention d'Est doit vous faire craindre la présence d'un singleton à gauche. Alors, ne soyez pas trop gourmand. Contentez-vous de couper un Trèfle (au besoin de l'As), mais ne vous faites pas couper l'un de vos honneurs. Pour cela, rejouez le 2 de Trèfle sous le Roi à la seconde levée. La coupe étant alors ouverte, vous couperez le 4 et ne réaliserez le Roi qu'après avoir extrait tous les atouts d'Ouest.

 

B) LE LOB

 

             ♠ R D 8                            Contrat : 4 Piques

             6 5 2

             V 7 4                            Entame  : 3 tours de Carreau

             A R 5 3

♠ 7                         ♠ V X 9 6

V 9 8 4 3                 X

R D X 3                   A 9 5 2

V 8 7                     D X 4 2

             ♠ A 5 4 3 2

             A R D 7

             8 6

             9 6

Vous coupez, puis tirez Roi et Dame d'atout. A votre grand désappointement, Ouest défausse au second tour.

Maintenant que vous avez trois perdantes certaines, il vous faut absolument éviter de perdre aussi un Cœur.

Eh bien, vous pourriez tabler car vous êtes absolument certain de gagner quelle que soit la répartition des Cœurs !

Il vous suffit de les jouer en partant les trois fois de Nord en lob vers votre main. Si Est s'interpose en coupant (comme ici au deuxième tour), ce sera une perdante et 'avec son argent', et s'il refuse à chaque fois de couper; il vous laissera réaliser successivement vos trois honneurs et vous couperez le 7 de Cœur avec le 8 de Pique. A son grand dam d'Est ne fera qu'une seule levée.

 

Exercice n°1

             ♠ 7 4 3                            Contrat : 4 Piques

             8 6 5 2

             D 3 2                            Entame  : 3 tours de Trèfle

             4 3 2

♠ 2                         ♠ V X 9 8

X 7 3                     D V 9 4

V X 8 6                    9 7

R D V 9 5                 A X 8

             ♠ A R D 6 5

             A R

             A R 5 4

             7 6

Vous coupez et tirez deux tours d'atout. Hélas, Ouest défausse au second tour. Il devient absolument indispensable de vous débarrasser de votre petit Carreau. Là encore, vous allez abandonner les atouts et aborder les Carreaux en utilisant la technique du lob. Comme vous n'avez qu'une seule rentrée au mort, vous ne pouvez pas vous prémunir contre un singleton à droite, mais au moins contre un doubleton. Jouez l'As de Carreau, puis un petit vers la Dame. Si Est ne vous a pas coupé, miam miam (!), repartez du 3 vers votre main. Cette fois, Est peut faire ce qu'il veut, vous êtes sauvé. Il ne fera qu'un atout!

 

Exercice n°2

             ♠ 7 4 2                            Contrat : 4 Piques

             D 8 3

             A 6 5 2                          Entame  : Dame de Trèfle

             9 8 3

♠ 3                         ♠ V X 9 5

V 9 7 4 2                 X

D X 4                      R V 8 3

D V X 2                   R 7 5 4

             ♠ A R D 8 6

             A R 6 5

             9 7

             A 6

Vous prenez de l'As, tirez deux tours d'atout et là encore Ouest défausse au second tour. Fort de vos connaissances en matière de Guillemard et de lob, vous vous attaquez aux Cœurs de la façon étudiée précédemment, c'est-à-dire petit pour la Dame et petit vers votre main. Est coupe 'ce n'est pas grave', pensez-vous, 'c'est une perdante !'. Mais la suite est moins réjouissante. Est retrouve son partenaire à Trèfle et bénéficie d'une autre coupe. Pour éviter ce flanc meurtrier, vous auriez dû laisser passer l'entame afin de couper les communications entre les deux défenseurs, en espérant qu'ils ne contre-attaquent pas à Carreau.

 

Exercice n°3

             ♠ R V 5                            Contrat : 4 Piques

             4 3 2

             8 7 5                            Entame  : Dame de Trèfle et Trèfle

             R 7 5 4

♠ 9 7                       ♠ 8 3 2

V X 9 8                   7 6

R V X                     D 4 3 2

D V X 2                   A 9 8 6

             ♠ A D X 6 4

             A R D 5

             A 9 6

              3

Avec un Trèfle et deux Carreaux perdants, il vous faut absolument éviter de concéder un Cœur. Mais dans le cas présent, le gain de votre contrat n'est pas nécessairement subordonné, si les Cœurs sont 4-2, à la présence du dernier atout dans la main des quatre Cœurs. Vous avez en effet une autre possibilité grâce à une combinaison de lob et de transfert de coupe!

Après avoir coupé à Trèfle, tirez l'As d'atout, puis As et Roi de Cœur avant le deuxième atout. Vous avancez alors le dernier Cœur en lob vers votre main. Si c'est Est qui possède le dernier atout, il est muselé. En effet :

- s'il coupe, c'est dans le vide; vous effacerez tout bonnement l'un des Carreaux du mort sur la Dame de Cœur et vous couperez ultérieurement un Carreau en Nord.

-  s'il préfère défausser (ce qui serait tout de même étonnant...), vous prendrez de la Dame de Cœur, puis couperez maître le quatrième!

 

CONCLUSION

 

Comme vous avez pu le constater, les atouts du côté court sont d'un précieux secours. Mais pour en tirer la quintessence, il faut tenter d'annihiler ceux des adversaires.

Nous venons ensemble de faire un tour d'horizon assez complet des manœuvres à utiliser.

Avant de nous quitter, il n'est peut-être pas inutile d'en résumer les principes essentiels.

1 : Quand une coupe est menacée de surcoupe, vous coupez maître si vous en avez les moyens. Sinon, vous transférez la coupe dans une autre couleur, grâce à un jeu de perdante sur perdante.

 

2 : Pour donner précisément deux tours de débarras quand vos atouts sont commandés uniquement par l'As, commencez par donner un coup à blanc avant de tirer l'As. Vous garderez la maîtrise de la situation et l'adversaire réalisera son atout maitre quand bon lui semblera.

 

3 : Quand vous avez deux coupes à effectuer et que vous pouvez vous permettre de perdre une levée d'atout, il faut, pour les assurer, couper maître la première fois, alors que d'instinct on serait plutôt enclin à faire le contraire.

 

4 : Quand les enchères vous font craindre des répartitions irrégulières, songez, si vous en avez les moyens, à ouvrir la coupe par un coup à blanc afin d'éviter de vous faire couper une carte maîtresse.

 

5 : Quand vous détenez une couleur secondaire à perdante éventuelle, il faut en tester la répartition en laissant, si nécessaire, traîner un atout chez l'adversaire. Si c'est ce dernier qui détient à la fois l'atout restant et la longue, vous pourrez couper impunément votre perdante. Cette technique est baptisée manœuvre de Guillemard, du nom de son créateur. Mais comme elle n'occasionne jamais de surcroît de levées de chute, elle ne doit pas être uniquement utilisée pour gagner un contrat. Elle peut l'être aussi pour essayer, sans risque aucun, de réaliser une levée supplémentaire.

 

6 : Quand vous prévoyez de couper éventuellement par un atout qui n'est pas maître la quatrième carte d'une couleur répartie 4-3 commandée par As-Roi (A R x x / x x x), songez à ouvrir la coupe par un coup à blanc immédiat.

 

7 : quand vous détenez plusieurs honneurs dans une couleur à perdante et que l'adversaire placé devant vous détient un atout maître, ingéniez-vous à jouer le maximum de fois petit en lob vers les honneurs. De la sorte, s'il coupe, ce sera une perdante et s'il refuse de le faire, il vous laissera réaliser tous vos honneurs.

 

8 : Si vous voulez assurer deux coupes avec des petits atouts, ne commettez pas la faute de jouer tout de suite le gros honneur qui les accompagne. Attendez d'avoir coupé une fois avant de le faire.