Raisonnement en flanc (M. Bessis - Bridgeur n°724 - décembre 1999)

 

Depuis une quinzaine d'années, le niveau général du bridge s'élève régulièrement. Les joueurs moyens sont devenus beaucoup plus combatifs à l'enchère. Heureusement pour les meilleurs, il existe un domaine dans lequel les différences de niveau sont encore très importantes: c'est celui du raisonnement en flanc.

 

Le «plan ORSEC»

 

Pourquoi un tel écart ? D'une part, parce qu'il s'agit d'un domaine très délicat et d'autre part, parce que la majorité ne sait pas se poser les bonnes questions. En caricaturant un tout petit peu, on peut résumer ainsi l'attitude du joueur de flanc : il guette l'appel ou le signal de son parte­naire et, dès qu'il l'a décelé (ou cru l'apercevoir), il rejoue sans plus attendre dans la couleur suggérée par ce signal.

Eh bien, je tiens à vous le dire: « ça ne va pas ». Il faut arri­ver, en défense aussi, à réaliser un plan de jeu, à compter ses levées et à échafauder des hypothèses rationnelles conduisant à la défaite du déclarant. Pour cela, la plus importante des qualités nécessaires au joueur de flanc sera d'effectuer un diagnostic correct. A l'issue de cette réflexion :

 

1. il constate que le déclarant n'a pas à sa disposition le potentiel de levées nécessaires à la réussite de son contrat. Alors il devra appliquer une politique d'extrême neutralité: celle qui consiste à ne pas jouer de nouvelles couleurs et à ne prendre aucun risque, bref à laisser le déclarant se débrouiller tout seul.

 

2. Il constate en revanche que le déclarant possède un matériel suffisant pour réaliser le nombre de levées qu'il s'est engagé à faire. Alors là, il faudra adopter une poli­tique tout à fait différente: celle qui consiste à espérer chez le partenaire les cartes nécessaires à la chute du contrat et à prendre tous les risques. C'est ce qu'on appel­lera le plan Orsec.

Illustrons ce propos par deux donnes assez semblables en apparence.

 

Donne n°1

Vous êtes en Est, après la séquence :

 

Ouest   Nord    Est     Sud

2♠ *    X       -       4

(*) faible

 

Votre partenaire entame de la Dame de Pique :

                                          A 5

                                          A V 4

                                          D 6 2

                                          A V X 9 3

                            ♠ 9 6 4

                            8 5 2

                            R 7 3

                            R 8 4 2

 

Le déclarant prend du Roi de sa main, encaisse trois tours d'atout et présente la Dame de Trèfle qui va jusqu'à votre Roi. Que ressentez-vous ? Si votre réponse est «pas grand-chose», je vous conseille d'arrêter immédiate­ment les calmants. En effet, le mort est éloquent et apporte visiblement quatre levées à Trèfle, ce qui porte le total du déclarant à onze levées si vous rejouez passi­vement Trèfle ou Pique. Il y a donc urgence à essayer d'encaisser le maximum de levées à Carreau. l'idéal serait que votre partenaire possède A V X dans la couleur. Remarquez que ce retour éviterait une levée supplémentaire si la teneur à Carreau de votre partenaire était moins consistante, la réalisation par votre camp de As et Roi de Carreau limitant le déclarant à dix levées.

Remarque : sur le troisième tour de Cœur, votre parte­naire peut vous appeler à Carreau (en défaussant un gros Pique). Mais il n'en demeure pas moins que le raisonnement doit vous conduire à rejouer Carreau, que cet appel ait eu lieu ou non.

Les quatre jeux :

                                          A 5

                                          A V 4

                                          D 6 2

                                          A V X 9 3

D V X 7 3 2               9 6 4

X 9                       8 5 2

A V X                     R 7 3

7 6                       R 8 4 2

                R 8

                R D 7 6 3

                9 8 5 4

                D 5

 

Donne n°2

Après la même séquence :

Ouest   Nord    Est     Sud

2♠ *    X       -       4

(*) faible

 

Votre partenaire entame à nouveau de la Dame de Pique :

                                          A 5

                                          A V 4 3

                                          D 6 2

                                          A V 5 4

                            9 6 4

                            8 5 2

                            R 7 3

                            R X 9 8

 

Le déclarant prend l'entame du Roi, encaisse trois tours d'atout (votre partenaire défaussant deux gros Piques) et continue par Trèfle pour le Valet et votre Roi. Qu'en pensez-vous ?

La situation est très différente de la précédente. Votre teneur à Trèfle vous permet de savoir que le déclarant ne réalisera que deux levées dans cette couleur. En consé­quence, vous ne lui comptez que neuf levées : deux Piques, cinq Cœurs et deux Trèfles. Ce n'est pas le moment de se mouiller, il n'y a pas péril en la demeure. Rejouez passive­ment Pique et attendez sereinement la suite.

Les quatre jeux :

 

                                          A 5

                                          A V 4 3

                                          D 6 2

                                          A V 5 4

D V X 7 3 2               9 6 4

X                         8 5 2

A X 9 4                   R 7 3

7 2                       R X 9 8

                R 8

                R D 9 7 6

                V 8 5

                D 6 3

 

Trois remarques :

- en produisant ce flanc passif, vous battez le contrat, que le partenaire possède ou non AVX de Carreau.

- L'appel à Carreau du partenaire ne résout rien. Seul le raisonnement vous permet de trouver le bon flanc.

- Le déclarant aurait pu gagner son contrat en jouant Trèfle vers la Dame puis Trèfle à blanc, après avoir éliminé les Piques mais... « Nobody is perfect» !

 

Nous l'avons vu, la difficulté réside dans le diagnostic de la situation. Il faut absolument que vous vous entraîniez à repérer les situations d'urgence dans les­quelles une action courageuse est nécessaire. Dans la suite de cet article, nous nous intéresserons surtout à l'analyse des mesures à prendre dans les cas cruciaux. Mais n'oubliez pas que c'est le compte des levées du déclarant qui vous permettra de vous rendre compte qu'il est nécessaire de prendre le taureau par les cornes.

Si ce compte vous paraît trop difficile à réaliser, alors, et surtout dans les contrats à la couleur, contentez-vous de réagir de la façon suivante :

- Si le mort est plat et ne présente pas de source appa­rente de défausse, soyez passif.

- Si une longue affranchissable ou affranchie apparaît, déclenchez le plan Orsec.

 

Le plan Orsec présente deux aspects principaux :

- Si le déclarant n'a plus besoin de rendre la main pour établir les levées nécessaires, le flanc sera tenu d'encais­ser la chute tout de suite.

- Si le flanc dispose encore d'une ou plusieurs reprises, il devra parvenir à affranchir, pour son camp, les levées qu'un flanc passif ne permettrait pas de réaliser.

 

 

I. Le flanc n'a plus de reprise : encaisser la chute

 

1) Le diagnostic

Cette situation d'extrême urgence existe aussi bien à Sans-Atout que dans les contrats à la couleur. Bien sou­vent, le diagnostic est facilité par un compte de points.

Exemple :

                                          ♠ D V

                                          X 6 5

                                          R 7 4 2

                                          A V 5 2

                            A 7

                            A D 9 3

                            9 8 5 3

                            7 6 4

 

Après la séquence :

Sud     Ouest   Nord    Est

1SA     -       -       3SA

 

Votre partenaire entame du 8 de Pique.

- Première constatation : il ne s'agit pas d'une quatrième meilleure (si c'était le cas, Ouest posséderait R X 9 8 et aurait attaqué du X).

- Deuxième constatation : votre partenaire possède un maximum de quatre points d'honneurs.

 

La situation est compromise : c'est donc le moment d'être optimiste. En effet, que pouvez-vous faire si les points de votre partenaire sont à Trèfle ou à Carreau ? Il semble que le seul espoir réside dans l'encaissement immédiat de quatre levées à Cœur. Alors, courage : pre­nez de l'As de Pique et rejouez Cœur.

Les quatre jeux :

                                          ♠ D V

                                          X 6 5

                                          R 7 4 2

                                          A V 5 2

9 8 6 5 2                 A 7

R 7 2                     A D 9 3

X 6                       9 8 5 3

X 8 3                     A 7 6 4

                R X 4 3

                V 8 4

                A D V

                R D 9

 

Remarquez l'importance de la carte d'entame choi­sie par Ouest : la seconde meilleure avec cinq petites cartes. C'est ce qui permet à Est une bonne lecture de la couleur.

 

Cette notion d'urgence à encaisser rapidement la chute peut s'imposer au flanc dès l'entame. Vous le savez, l'ouverture de 3SA promet une longue mineure totalement affranchie. Par-là même, elle suggère au flanc qu'il faut faire vite. C'est pourquoi, il est recom­mandé, contre une telle ouverture, d'entamer d'un As «pour voir».

Ainsi, après la séquence :

Sud     Ouest   Nord    Est

3SA     -       -       -

 

Vous entamez de l'As de Pique et découvrez :

                                          D V 9 4

                                          A R 6 2

                                          R 8 3

                                          7 3

A 5 3  

D V X 5 3

V 7 5 2

8

 

Que rejouez-vous ?

Facile ! Une fois que vous avez évité le piège de l'en­tame de la Dame de Cœur, qui conduisait irrémédia­blement à la réalisation de neuf levées par le décla­rant, il n'y a qu'une chance de battre le contrat trouver A D X x (x) ou A D 9 x (x) à Carreau en Est. Une seule carte permet alors d'encaisser la chute : le Valet de Carreau.

Les quatre jeux :

                                          D V 9 4

                                          A R 6 2

                                          R 8 3

                                          7 3

A 5 3                     R X 7

D V X 5 3                 8 7 4

V 7 5 2                   A D 9 6

8                         X 9 4

                8 6 2

                9

                X 4

                A R D V 6 5 2

 

2) La réalisation

Contre les contrats à la couleur, les manières d'encaisser la chute ne se limitent pas à la réalisation de levées d'honneurs. Obtenir une coupe ou organiser une promotion d'atout sera souvent la clé de la mise en échec de bien des contrats. Exemples.

a) Après la séquence :

Sud     Ouest   Nord    Est

1♠      -       2      -

2♠      -       4♠

 

Ouest entame de la Dame de Cœur.

 

                                          D X 6 4

                                          4

                                          A D V 6 3

                                          D 9 5

9 7                       R X 7

D V 6 5                   8 7 4

9 7                       A D 9 6

A 8 7 3 2                 R 6

                A R V 3 2

                X 9 3

                R X

                V X 4

 

Vu de la main d'Est, tout indique que l'on est face à une situation d'urgence : la belle longue au mort et l'absence de contrôle dans cette couleur comme à l'atout doivent réveiller Est et le conduire à échafauder l'hypothèse la plus vraisemblable permettant de battre le contrat : trouver l'As de Trèfle en Ouest. Aussi doit-il prendre la Dame de Cœur du Roi et rejouer bravement le Roi de Trèfle espérant ainsi réaliser un Cœur, deux Trèfles et une coupe.

Imaginons que, légèrement assoupi, Est n'agisse pas de la sorte. Ouest est alors en main à la Dame de Cœur et doit raisonner ainsi :

- j'ai deux levées devant moi, il m'en manque deux et il faut les trouver assez vite, car les Carreaux sont assez inquiétants.

- Que peut avoir mon partenaire, sachant qu'il a déjà montré As-Roi de Cœur ? Au plus un Roi. De préférence à Trèfle ou à Carreau, pour que l'on ait une chance. Mais cela ne fait que trois levées. La quatrième ne peut provenir que d'une coupe à Trèfle. Pour cela, il faut que le par­tenaire possède soit le Roi de Trèfle second soit un singleton (solution bien moins probable que le Roi second). Le flanc logique, bien que difficile, pour battre le contrat consiste donc à jouer un petit Trèfle sous l'As.

 

b) Après la séquence :

Sud     Ouest   Nord    Est

1♠      -       4♠

 

Vous entamez, en Ouest, de l'As de Carreau.

                                          8 6

                                          A D X

                                          V X 5

                                          A R D 9 8

X 5 2  

9 8 6

A R D 4

V 7 6

 

Votre partenaire fournit le 6 et le déclarant le 2. Ne voyant rien de mieux à faire, vous poursuivez du Roi et, voyant apparaître le 7 en Est, encaissez également la Dame. Et maintenant ?

- Premier point : il nous reste une levée à trouver.

- Deuxième point : il y a urgence, car les Trèfles du mort sont menaçants.

- Troisième point : compte tenu de l'ouverture, c'est Est qui possède le Roi de Cœur.

- Quatrième point : Sud, chez qui on connait sept Piques et trois Carreaux, n'a que trois cartes entre les Trèfles et les Cœurs. En conséquence, le retour Cœur est inopérant car le déclarant dispose de défausse immédiate grâce aux Trèfles.

Conclusion : le seul espoir de chute réside dans la réalisation d'une levée d'atout. Il faut donc rejouer le dernier Carreau, dans coupe et défausse, en espérant que votre partenaire possède le Valet, la Dame ou le Roi de Pique et, qu'en coupant, il assure la promotion de votre 10 d'atout troisième.

Les quatre jeux :

                                          8 6

                                          A D X

                                          V X 5

                                          A R D 9 8

X 5 2                     D

9 8 6                     R V 4 3 2

A R D 4                   9 7 6

V 7 6                     5 4 3 2

                A R V 9 7 4 3

                7 5

                8 3 2

                X

 

Parfois, souvent même, la situation d'urgence est moins apparente parce que l'un des flancs détient une garde ou une reprise de main dans les couleurs du déclarant. Ce n'est pas une raison pour adopter un flanc neutre si l'affranchissement menace. Il faut entreprendre, pour votre camp, l'éta­blissement des levées nécessaires à la chute avant qu'il ne soit trop tard.

En un mot comme en cent, il faut gagner la course de vitesse.

 

II. Affranchir tant que l'on contrôle

 

Ne vous y trompez pas ! Ce n'est pas parce que vous déte­nez encore une reprise que des mesures d'urgence ne doi­vent pas être déclenchées. Il faudra, même dans ce cas, savoir réaliser un diagnostic correct, échafauder les hypo­thèses de nécessité obligatoires et jouer en conséquence.

 

1) Le diagnostic

Exemple :

Après la séquence :

Sud     Ouest   Nord    Est

                1      -

1♠      -       2      -

2SA     -       3♠      -

3SA

 

Votre partenaire entame de la Dame de Cœur.

                                          ♠ A D 8

                                          9

                                          D V X 6 3

                                          A 6 3 2

                            9 7 5 2

                            8 3

                            A R 4

                            R V 7 4

 

Le déclarant prend de l'As et présente le 9 de Carreau (le 7 en Ouest) et c'est à vous.

­Vous savez que le déclarant possède As et Roi de Cœur. ­Continuer Cœur ne présente donc aucun intérêt puisque, quand vous prendrez la main pour la deuxième fois à Carreau, vous n'aurez plus de Cœur à rejouer. La chute ne peut provenir que de la réalisation de trois levées à Trèfle. Mais attention, pour pouvoir les encaisser, il faut, et de manière urgente, faire sauter cet As de Trèfle. Une nécessité : que votre partenaire détienne la Dame au moins seconde. Alors courage, prenez du Roi de Carreau et rejouez le 4 de Trèfle. Votre reprise à Carreau vous permettra d'encaisser la chute.

Les quatre jeux :

                                          A D 8

                                          9

                                          D V X 6 3

                                          A 6 3 2

X 4                       9 7 5 2

D V X 6 5 4 2             8 3

7 5                       A R 4

D 8                       R V 7 4

                R V 6 3

                A R 7

                9 8 2

                X 9 5

 

Remarquez, et c'est là que réside toute la difficulté de ces flancs d'urgence, qu'il a fallu rejouer sous Roi-Valet pour établir vos levées de Trèfle, car ces levées potentielles ne deviendront réelles que si le contrôle adverse a sauté avant le vôtre.

 

Cette notion de course à l'affranchissement se retrouve également à la couleur.

Après la séquence :

Sud     Ouest   Nord    Est

1      -       2      2♠

3      3♠      4

 

Vous entamez, en Ouest de l'As de Pique.

                                          R 5

                                          X 9 3

                                          R D X 5 3

                                          9 6 5

A 4 3  

8 6 2

A 9 6 2

D 8 2

 

La lumière rouge doit s'allumer : les Carreaux du mort menacent. Heureusement, vous les contrôlez. Malheureu­sement, le 10 de Cœur du mort est une rentrée certaine. Quel retour choisissez-vous ? Trèfle, bien sûr, en espérant l'As ou Roi-Valet chez votre partenaire pour affranchir deux levées tant que vous contrôlez la longue du mort.

 

Les quatre jeux :

                                          R 5

                                          X 9 3

                                          R D X 5 3

                                          9 6 5

A 4 3                     D V X 8 6 2

8 6 2                     5 4

A 9 6 2                   8 7

D 8 2                     A X 7

                9 7

                A R D V 7

                V 4

                R V 4 3

 

Avant d'aller plus loin, Il importe de définir précisément la notion de contrôle par le flanc d'une source de levées pour le déclarant.

Une longue adverse ne peut être encaissée si l'un des flancs détient un arrêt dans cette couleur ou s'il peut cou­per. Ceci veut dire que le contrôle d'une longue peut être également constitué par un arrêt (As ou Roi) dans la cou­leur d'atout. Pensez-y au moment de l'établissement de votre plan de défense.

Dans les exemples que nous venons d'étudier, le diagnostic était relativement aisé, car c'est vous qui déteniez le contrôle de la couleur adverse. Il arrivera également qu'il soit néces­saire d'effectuer des hypothèses sur la possession de ce contrôle par le partenaire. Le plan Orsec devra être déclenché de la même manière si l'urgence de la situation le réclame.

 

Après la séquence :

Sud     Ouest   Nord    Est

                1      -

1♠      -       3♠      -               

4♠

 

Vous entamez de l'As de Carreau sur lequel Est fournit le Valet. Comment vous sentez-vous ?

                                          A D X 6

                                          A 4

                                          8 3

                                          R D V 9 5

7 4

R 8 6 5

A R 5 4

X 7 2

 

Si vous avez bien lu le début de l'article, vous avez dia­gnostiqué sans mal la situation d'urgence. Les Trèfles du mort sont effrayants. Malheureusement, vous ne contrôlez ni les atouts, ni les Trèfles. Qu'à cela ne tienne!  Pour avoir une chance de battre ce contrat, il faut qu'Est possède l'As de Trèfle ou le Roi de Pique.

Dans cette hypothèse (nécessaire), il importe que vous affranchissiez sans plus tarder la quatrième levée de votre camp. Il faut jouer Cœur en espérant qu'Est détienne la Dame. Tout autre retour n'aurait aucun sens.

Les quatre jeux :

                                          A D X 6

                                          A 4

                                          8 3

                                          R D V 9 5

7 4                       9 2

R 8 6 5                   D X 9 3 2

A R 5 4                   V X 9 6

X 7 2                     A 3

                R V 8 5 3

                V 7

                D 7 2

                8 6 4

 

Deux remarques s'imposent:

· Si Est ne détient pas la Dame de Cœur, le retour Cœur ne donne pas de levée supplémentaire.

· Remerciez votre partenaire pour son Valet de Car­reau, qui vous indique qu'il serait fatal d'encaisser le Roi car la Dame du déclarant lui permettrait la défausse du Cœur du mort.

Il peut se faire que les hypothèses nécessaires à la chute du contrat soient moins faciles à formuler. Il fau­dra alors, comme lorsque l'on est déclarant, s'évertuer à cumuler les chances.

 

Exemple, après la séquence :

Sud     Ouest   Nord    Est

                1      -

1      -       2      -

2      -       3      -

3SA

 

Vous entamez en Ouest du 2 de Pique (je sais, c'est très  mal mais Alain Lévy lui-même est d'accord, alors...)

                                          X 4

                                          9 5

                                          A D V X

                                          A R D V X

A V 8 2

A V 4

8 7 6

9 5 4

 

Votre partenaire prend du Roi (le 3 en Sud) et rejoue le 9 pour le 5 de Sud et votre Valet. Et maintenant ? La situation est relativement grave. Sud possède encore un arrêt à Pique (la Dame seconde), comme vous l'in­dique cruellement le 9 de votre partenaire (pair-impair du résidu). Vous n'avez donc que quatre levées immédiatement réalisables. Il faut trouver un appui en Est. Lequel ?

Le Roi de Carreau ferait, bien sûr, l'affaire car il permet­trait à votre partenaire de traverser à nouveau la Dame de Pique du déclarant. Mais attention ! Si Est détient cette carte, Sud ne pourra pas réaliser neuf levées sans passer par les Carreaux. Il n'y a donc aucun intérêt à rejouer Carreau. Si, en revanche, Est détient le Roi de Cœur (et Sud le Roi de Carreau), il est vital de jouer Cœur tout de suite, faute de quoi le déclarant alignerait   neuf levées sans coup férir.

Une dernière précaution à prendre : rejouer un petit Cœur, car encaisser l'As risquerait de permettre au déclarant de réaliser quatre levées de Cœur s'il possédait R D x x x.

Par ce retour, vous battez le contrat quel que soit le Roi rouge possédé par votre partenaire.

Les quatre jeux :

                                          X 4

                                          9 5

                                          A D V X

                                          A R D V X

A V 8 2                   R 9 6

A V 4                     R X 6

8 7 6                     9 5 4 2

9 5 4                     7 3 2

                D 7 5 3

                D 8 7 3 2

                R 3

                8 6

 

Cet exemple permet d'énoncer une règle de la plus  haute importance : Quand vous cherchez à redonner la main à votre partenaire, ne choisissez pas de le faire dans la couleur par laquelle devra fatalement passer le déclarant pour réaliser son contrat.  En version allégée : ne jouez jamais dans les longues affranchissables du mort. Laissez ce soin au déclarant.

Eh oui ! Encore la fin d'un mythe : «devant le mort, dans la forte du mort». On ne sait plus à quoi se fier.